La possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent constitue un objectif de valeur constitutionnelle, déduit des dixième et onzième alinéas du préambule de la Constitution de 1946 (no 94-359 DC du 19 janvier 1995). Plus récemment, le Conseil constitutionnel a reconnu, dans sa décision no 98-403 DC du 29 juillet 1998, la légitimité de la mise en oeuvre par le législateur de politiques spécifiques liées à la recherche de la mixité sociale dans les villes et les quartiers.
Comme le soulignent les professeurs M. de Villiers et Th.S. Renoux dans leur « Code constitutionnel » (Litec, 2e éd., p. 253) l'objectif constitutionnel que constitue la possibilité d'obtenir un logement décent est « une finalité assignée à l'autorité normative, qui doit l'atteindre en conciliant des droits fondamentaux, parfois antagonistes ».
Tel est l'un des objets de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbains, adoptée le 21 novembre 2000. Ce texte a été déféré au Conseil constitutionnel par plus de soixante sénateurs et par plus de soixante députés, qui en contestent plusieurs dispositions en faisant valoir de nombreux moyens qui appellent, de la part du Gouvernement, les observations suivantes.
I. - Sur l'article 3
A. - Cet article est relatif aux schémas de cohérence territoriale, qui doivent remplacer les schémas directeurs.
Le nouvel article L. 122-1 du code de l'urbanisme en détermine le contenu. Le II de l'article L. 122-3 prévoit que le schéma doit couvrir un territoire d'un seul tenant et sans enclave. La loi précise que, lorsque le périmètre du schéma concerne des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents en la matière, il recouvre la totalité du périmètre de ces établissements.
Le II de l'article L. 122-3 précise que le schéma doit tenir compte, notamment, des périmètres des groupements de communes et des agglomérations nouvelles.
Pour contester ces dispositions, les députés, auteurs du second recours, soutiennent qu'elles favorisent une confusion des compétences entre communes et établissements publics de coopération intercommunale et portent atteinte au principe constitutionnel « d'autonomie » des collectivités territoriales.
B. - Cette argumentation procède d'une interprétation inexacte des dispositions introduites dans le code de l'urbanisme par l'article 3.
L'objet des schémas de cohérence territoriale, comme d'ailleurs des anciens schémas directeurs, consiste, pour les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale, à définir en commun les objectifs d'aménagement à l'échelle de l'ensemble de leur agglomération.
Cette démarche ne crée aucune confusion de compétence, les schémas de cohérence territoriale n'ayant vocation qu'à traiter les problèmes qui correspondent à des enjeux intercommunaux. Ils fixent un cadre général permettant à chacune des autorités compétentes en matière d'urbanisme, d'habitat, de déplacement et de développement commercial d'élaborer son propre document de planification.
Ces documents devront simplement respecter une obligation de compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale. Cette notion de compatibilité, qui régissait déjà, notamment, les rapports entre les schémas directeurs et les plans d'occupation des sols, a été précisée par une jurisprudence constante, qui veille à ce que le document de niveau supérieur respecte l'autonomie de décision des autorités chargées d'élaborer les documents d'application.
Les critères qui doivent être pris en compte lors de la détermination du périmètre des schémas de cohérence territoriale, qui correspondent à des données objectives permettant d'assurer la cohérence des politiques des collectivités et des EPCI d'une même agglomération, portent d'autant moins atteinte à l'autonomie de ces collectivités, que le périmètre ne peut être délimité que sur leur proposition.
II. - Sur l'article 4
A. - Cet article est relatif aux nouveaux plans locaux d'urbanisme (PLU) qui se substitueront aux plans d'occupation des sols (POS).
La nouvelle rédaction donnée à l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme précise que les PLU doivent obligatoirement :
- fixer les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire ;
- délimiter les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger ;
- définir, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions.
Comme les anciens plans d'occupation des sols, ils ont en outre la faculté d'édicter, pour la mise en oeuvre du projet d'aménagement et de développement durable de la commune, des règles d'urbanisme dans des domaines définis limitativement par la loi. Mais les PLU ne sont pas tenus, contrairement aux POS, de définir pour chaque zone constructible « l'affectation des sols selon l'usage principal qui doit en être fait ou la nature des activités dominantes qui peuvent y être exercées ». Le législateur entend en effet favoriser la « diversité des fonctions urbaines », selon la formulation introduite dans cet article par le Sénat.
Le 3o de l'article L. 123-1 permet en outre de « subordonner, dans les villes de Paris, Lyon et Marseille, tout changement de destination d'un local commercial ou artisanal entraînant une modification de la nature de l'activité, à l'autorisation du maire de la commune, délivrée conformément à l'avis du maire d'arrondissement ou de secteur ».
Les sénateurs, auteurs du premier recours, critiquent cette dernière disposition, comme contraire à la liberté du commerce et de l'industrie, à la liberté d'entreprendre, au droit de propriété et au principe d'égalité.
De leur côté, les députés, auteurs du second recours, considèrent que le nouvel article L. 123-1 conduit, de manière générale, à des ruptures d'égalité entre propriétaires fonciers et permet une atteinte à la libre disposition de son bien par un propriétaire, sans apporter de garanties de fond et de procédure. Ils contestent également, comme étant dépourvus de telles garanties, les a et b de l'article L. 123-2, permettant l'interdiction des constructions d'une superficie supérieure à un seuil fixé par le règlement, pendant une durée pouvant aller jusqu'à cinq ans. Ils estiment que le législateur aurait dû prévoir un mécanisme d'indemnisation.
B. - Ces moyens ne sont pas fondés.
1. S'agissant d'abord de la critique que les sénateurs adressent au 3o du nouvel article L. 123-1, on doit observer que la liberté du commerce et de l'industrie ne fait pas obstacle à la mise en place d'un régime d'autorisation particulière instituée par le plan local d'urbanisme. Compte tenu de l'insertion de ce dispositif dans l'article L. 123-1, dont le deuxième alinéa inclut la « sauvegarde de la diversité commerciale des quartiers » au nombre des objectifs que prend en compte le PLU, cette autorisation ne peut avoir pour objet que de veiller au respect des objectifs ainsi fixés. On peut d'ailleurs noter que les motifs d'un refus d'autorisation seront nécessairement portés à la connaissance de l'intéressé en application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979.
Par ailleurs, il est de la nature même de l'organisation administrative particulière des villes de Paris, Marseille et Lyon, qui prévoit des maires et des conseils d'arrondissement, d'octroyer à ces autorités locales des pouvoirs particuliers.
2. En deuxième lieu, c'est à tort qu'il est fait grief au mécanisme des PLU de conduire à des ruptures d'égalité entre propriétaires fonciers et de porter atteinte au droit de propriété.
En effet, il est de la nature même des plans locaux d'urbanisme de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes ainsi que des zones inconstructibles. Dès lors que les règles des plans locaux ne reposent pas sur une appréciation erronée des faits, n'excèdent pas les limitations au droit de propriété autorisées par la loi et respectent les principes de fond définis par le législateur, elles ne portent pas d'atteintes inconstitutionnelles au principe d'égalité. Ainsi que l'a rappelé le Conseil constitutionnel à propos des plans d'occupation des sols, « l'administration ne trouve pas dans le droit d'établir lesdits documents, soumis au contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la faculté de déterminer arbitrairement la qualification des biens immobiliers et les possibilités de construire » (no 85-189 DC du 17 juillet 1985). Or, les dispositions législatives qui encadrent désormais les plans locaux d'urbanisme sont comparables à celles qui encadraient les POS.
La loi précise que les auteurs d'un plan local d'urbanisme déterminent des règles adaptées aux circonstances locales pour permettre la réalisation des objectifs définis par les articles L. 121-1 et L. 123-1 du code de l'urbanisme. Cette disposition permet la prise en compte des particularités et ne méconnaît donc pas le principe d'égalité.
En précisant, dans l'intérêt général, les conditions d'utilisation et de constructibilité des terrains, les plans locaux d'urbanisme ne portent pas davantage d'atteinte excessive au droit de propriété que les anciens plans d'occupation des sols.
3. En troisième lieu, et à supposer que les garanties de procédure dont font état les requérants correspondent à une exigence constitutionnelle, il convient de souligner que la loi offre aux propriétaires toute possibilité d'intervenir dans le cours de la procédure :
- en prévoyant, au nouvel article L. 123-6 du code de l'urbanisme, une concertation publique menée conformément à l'article L. 300-2, c'est-à-dire « associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole » ;
- en soumettant à enquête publique le projet avant son approbation.
Les personnes intéressées sont donc parfaitement mises à même de faire connaître leurs observations à ces différents stades.
4. En quatrième lieu, c'est en vain que les députés requérants critiquent les a et b de l'article L. 123-2 nouveau du code de l'urbanisme.
Ces dispositions ne portent, en effet, aucune atteinte au droit de propriété.
Dans le cas prévu au a, la limitation au droit de construire est strictement temporaire et justifiée par la nécessité de ne pas compromettre ou rendre plus onéreuse la réalisation du projet d'aménagement étudié par la commune, ce qui répond à un objectif d'intérêt général. Dans le cas du b, la limitation supplémentaire au droit de propriété est très circonscrite : il n'est pas contestable que les documents d'urbanisme peuvent réserver des secteurs de la commune à la construction de logements. La disposition en cause permet simplement de préciser que tout ou partie de ces logements seront des logements sociaux.
Par ailleurs, la loi garantit les droits du propriétaire en lui permettant de faire jouer le droit de délaissement, c'est-à-dire d'exiger, s'il le souhaite, de la collectivité qu'elle procède à l'acquisition de son bien, comme cela découle de l'article L. 123-17 qui renvoie aux articles L. 230-1 et suivants résultant de l'article 22 de la loi. Le prix, y compris l'indemnité de remploi, est fixé comme en matière d'expropriation, sans qu'il soit tenu compte de l'éventuelle dépréciation apportée par la servitude. Il y a donc indemnisation de l'intégralité du préjudice subi par le propriétaire.
L'intéressé conserve en outre la faculté de conserver son bien soit pour l'utiliser conformément aux futures dispositions du plan, dans le cas prévu au a, soit pour y construire lui-même les logements prévus, dans le cas prévu au b.
III. - Sur l'article 19
A. - L'article L. 213-11 du code de l'urbanisme, issu de la loi du 18 juillet 1985, accorde un certain nombre de droits à l'ancien propriétaire ou à l'acquéreur évincé d'un bien préempté, si le titulaire du droit de préemption décide d'utiliser ou d'aliéner un bien acquis par exercice de ce droit depuis moins de dix ans à d'autres fins que celles définies à l'article L. 210-1.
Le II de l'article 19 critiqué réduit ce délai de dix à cinq ans.
Pour critiquer ces dispositions, les députés requérants font valoir que la réduction du délai pour exercer le droit de préemption n'est pas justifiée, alors qu'elle porte atteinte au droit de propriété et à la liberté contractuelle. Ils ajoutent que la mesure n'est pas proportionnée au but poursuivi et qu'une possibilité de recours juridictionnel aurait dû être prévue.
B. - Cette argumentation n'est pas fondée.
La réduction du délai au-delà duquel une commune peut disposer librement d'un bien préempté est sans incidence sur le délai dans lequel doit être exercé le droit de préemption lui-même. L'argumentation des requérants est donc largement inopérante.
Pour l'essentiel, l'article 19 s'inscrit dans la logique mise en place par le législateur de 1985. La réduction de dix à cinq ans du délai ne modifie pas fondamentalement l'économie du système : il s'agit seulement d'un assouplissement des règles d'utilisation des biens préemptés. Cet assouplissement ne porte pas une atteinte excessive au droit de propriété, dans la mesure où la préemption consiste en une substitution d'acquéreur et ne peut être exercée que dès lors que le bien a été mis en vente par son ancien propriétaire.
Il est vrai qu'un délai trop faible, risquant de favoriser des détournements de procédure, ne permettrait pas de s'assurer réellement de l'existence du motif d'intérêt général invoqué par le titulaire du droit de préemption pour exercer ce droit. Il est donc nécessaire que la loi fixe un délai suffisamment significatif pour éviter ce risque et pour garantir qu'à la date à laquelle le droit de préemption est exercé, son exercice correspond vraiment à un projet de la collectivité entrant dans les prévisions de la loi.
Mais en sens inverse, il peut arriver qu'une commune, après avoir fait usage de ce droit, trouve un autre emplacement pour réaliser l'opération dans de meilleures conditions, sans pouvoir, pour autant, utiliser le bien préempté, comme l'admet la jurisprudence (CE, 14 janvier 1998, Vaniscotte), à l'un des autres objets définis par la loi. Dans un souci de bonne gestion de son patrimoine foncier, il est alors légitime que la commune ne soit pas tenue de conserver trop longtemps le bien.
Dans ces conditions, il appartient au législateur de faire usage de son pouvoir d'appréciation en choisissant le délai qui lui paraît le plus approprié : s'il existe évidemment une différence, en termes d'opportunité, entre le délai de dix ans initialement fixé et celui de cinq ans retenu par le II de l'article 19, on voit mal quelle règle constitutionnelle commanderait de maintenir le premier et interdirait de préférer le second.
Enfin, le moyen tiré de l'insuffisance des voies de recours est dépourvu de portée, dès lors que la disposition contestée ne fait nullement obstacle à l'exercice de celles qui existent déjà en vertu de l'article L. 123-12 du code de l'urbanisme.
IV. - Sur l'article 36
A. - L'article L. 147-1 du code de l'urbanisme, issu de la loi du 11 juillet 1985, n'autorisait, en zone « C » des plans d'exposition au bruit que « les constructions individuelles non groupées situées dans des secteurs déjà urbanisés et desservis par des équipements publics dès lors qu'elles n'entraînent qu'un faible accroissement de la capacité d'accueil d'habitants exposés aux nuisances ».
Cette rédaction avait l'inconvénient d'interdire tout immeuble collectif, même dans les bourgs ou villages où ce type de construction existe déjà. La loi du 12 juillet 1999 a autorisé ces constructions collectives, « si elles s'accompagnent d'une réduction équivalente, dans un délai n'excédant pas un an, de la capacité d'accueil d'habitants dans des constructions existantes situées dans la même zone ».
Mais cette disposition est en pratique très difficile à mettre en oeuvre. Aussi a-il paru préférable de prévoir que les limitations apportées aux constructions collectives dans les bourgs existants soient comparables à celles apportées aux constructions individuelles non groupées. C'est l'objet de l'amendement qui est devenu l'article 36 de la loi, et qui prévoit que, dans les zones C, « pour permettre le renouvellement urbain des quartiers ou villages existants, des opérations de réhabilitation et de réaménagement urbain peuvent être autorisées, à condition qu'elles n'entraînent pas d'augmentation significative de la population soumise aux nuisances sonores ».
Pour contester cet article , les sénateurs, auteurs du premier recours, font valoir qu'en l'absence de limitation suffisamment précise de l'augmentation des constructions dans ces zones, elles portent atteinte au droit à la santé. Ils considèrent également que cette augmentation fera peser sur les compagnies aériennes et les aéroports des charges supplémentaires, en méconnaissance des articles 13 et 17 de la Déclaration de 1789.
B. - Cette argumentation repose sur une interprétation inexacte, tant des dispositions critiquées que des principes constitutionnels en cause.
L'article contesté précise suffisamment clairement les conditions d'application de ses dispositions, en indiquant que seules des « opérations de réhabilitation et de réaménagement urbain peuvent être autorisées », que ces opérations doivent avoir pour objet de « permettre le renouvellement urbain des quartiers ou villages existants » et qu'elles ne peuvent conduire à une « augmentation significative de la population soumise aux nuisances sonores ».
La souplesse apportée est destinée à permettre le réaménagement des quartiers et villages existants situés en zone C, où l'habitation n'est pas interdite, mais où le texte actuel interdit toute réhabilitation et tout réaménagement des quartiers d'immeubles collectifs existants. L'objectif législatif d'éviter une augmentation du nombre de personnes soumises aux nuisances sonores ne doit pas conduire à une dégradation générale des conditions de vie dans les quartiers existants.
La nouvelle disposition ne trouvera pas à s'appliquer individuellement, permis de construire par permis de construire, mais à l'opération d'aménagement (ZAC, lotissement), dans sa totalité, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir. La notion d'augmentation significative de la population est très proche de celle existant dans la loi depuis 1985 de « faible accroissement de la capacité d'accueil d'habitants exposés aux nuisances », qui a donné lieu à une jurisprudence précise du Conseil d'Etat (CE, 21 juillet 1989, commune de Villeneuve-Saint-Georges, Rec. p. 166).
En tout état de cause, les fondements constitutionnels de l'argumentation des requérants sont particulièrement incertains : il est clair que la reconnaissance d'un droit à la santé, issu du préambule de 1946, n'a ni pour objet ni pour effet d'interdire au législateur tout aménagement des règles d'urbanisme dans les zones exposées à des nuisances sonores.
V. - Sur l'article 54
A. - En application des dispositions du premier alinéa de l'article 1396 du code général des impôts, la taxe foncière sur les propriétés non bâties est assise sur 80 % de la valeur locative cadastrale des terrains assujettis.
Le second alinéa du même article autorise les communes à majorer la base d'imposition des terrains constructibles situés en zone urbaine des POS. Conformément aux dispositions de l'actuel article R. 123-18-1 du code de l'urbanisme, les zones urbaines sont celles dans lesquelles les capacités des équipements publics existants ou en cours de réalisation permettent d'admettre immédiatement des constructions.
Ainsi, en application de l'article 26 de la loi no 80-10 du 10 janvier 1980 et de l'article 91 de la loi no 93-1352 du 30 décembre 1980, les conseils municipaux peuvent, pour le calcul de la part communale de cette taxe, majorer, dans la limite de 200 % jusqu'en 1992 et dans la limite de 500 % depuis 1993, la valeur locative cadastrale des terrains constructibles, mais non construits, au regard des dispositions des documents d'urbanisme.
La majoration n'est pas applicable aux terrains non constructibles ainsi qu'aux terrains constructibles déjà classés dans la catégorie des terrains à bâtir pour la détermination de la valeur locative cadastrale.
L'introduction, en 1980, de ce dispositif de majoration de la base d'imposition des terrains non construits en zone urbaine, était motivée par la volonté d'inciter les propriétaires fonciers soit à mettre en oeuvre les droits à construire reconnus par la collectivité à leurs terrains, soit à les céder à un constructeur.
Ce dispositif s'est révélé inopérant. En effet, l'application de pourcentages de majoration même très élevés (500 %) à des bases d'imposition particulièrement faibles n'exerce aucune incitation sur les propriétaires fonciers et ne dégage aucune recette supplémentaire et significative pour les budgets communaux. Seules 974 communes ont délibéré en application du deuxième alinéa de l'article 1396 du CGI ; chacune de ces communes est bénéficiaire d'un gain fiscal supplémentaire moyen de 16 000 F par an.
Pour pallier l'inefficacité du dispositif actuel, l'article 54 de la loi déférée maintient le principe d'une majoration de la base d'imposition des terrains non bâtis mais constructibles et situés dans les seules zones urbaines définies dans les documents d'urbanisme (plans locaux d'urbanisme, cartes communales et plans de sauvegarde et de mise en valeur). Les terrains non constructibles et les terrains déjà classés dans la catégorie fiscale des terrains à bâtir pour la détermination de la valeur locative, au sens du premier alinéa de l'article 1396 du CGI, demeurent exclus du champ d'application de la majoration.
La réforme entreprise vise exclusivement à substituer au dispositif de majoration de la valeur locative en fonction d'un pourcentage, un mécanisme de majoration proportionnelle à la superficie des terrains concernés.
Selon les députés auteurs du second recours, l'article 54 introduit une discrimination entre propriétaires et rompt l'égalité devant l'impôt, faute de reposer sur des critères objectifs et rationnels.
B. - Ces griefs ne sauraient être accueillis.
Il faut en effet rappeler que la taxe foncière sur les propriétés non bâties est assise sur la valeur locative des biens qu'elle grève. S'agissant des terrains constructibles situés en zones urbaines des documents d'urbanisme, la détermination d'une telle valeur demeure théorique puisque le marché de la location de tels terrains, sur l'ensemble du territoire, a toujours été inexistant. L'absence de marché réel peut expliquer la faiblesse des valeurs locatives attribuées aux propriétés foncières non bâties en zone urbaine, alors même que leurs valeurs foncières patrimoniales sont très élevées.
Ces valeurs vénales élevées résultent essentiellement des dépenses engagées par les collectivités locales pour la réalisation et l'entretien des équipements publics qui rendent ces terrains constructibles.
Lorsque les droits de construire sont effectivement mis en oeuvre par les propriétaires fonciers, les communes bénéficient de recettes fiscales nouvelles résultant de l'assujettissement, d'une part, des nouvelles constructions à la taxe foncière sur les propriétés bâties et, d'autre part, des utilisateurs des nouveaux locaux soit à la taxe d'habitation, soit à la taxe professionnelle. Les propriétaires fonciers qui maintiennent leurs terrains nus et libres de toute construction privent de ressources fiscales la commune.
Les terrains entrant dans le champ d'application de la majoration sont exclusivement ceux qui, tout à la fois, sont situés dans une zone urbaine délimitée par un document d'urbanisme et sont constructibles.
En associant ainsi les propriétaires fonciers à la couverture des coûts d'équipements publics dont ils profitent et qui valorisent leurs biens, l'article 54 rétablit l'égalité de traitement entre les propriétaires fonciers bénéficiaires de tels équipements et repose sur des éléments objectifs et rationnels.
Par ailleurs, l'article 54 prévoit que la majoration décidée par le conseil municipal est proportionnelle à la superficie des terrains. En l'absence de marché locatif pour déterminer une exacte valeur locative, le critère d'application retenu est manifestement plus significatif et plus légitime que le dispositif auquel il est substitué.
VI. - Sur l'article 55
A. - L'article 55 de la loi déférée tend à faire en sorte que chaque commune urbaine dispose, au terme d'une période de vingt ans, d'une offre suffisante de logements locatifs sociaux accessibles aux ménages à ressources modestes ou moyennes.
A cette fin, il prévoit d'abord une procédure contradictoire d'inventaire des logements locatifs sociaux, avec chaque commune susceptible d'être concernée par les dispositions de la loi. Sur cette base, il organise, d'une part, un dispositif financier incitant les communes concernées à la réalisation de logements sociaux et, d'autre part, une procédure pour parvenir effectivement à la réalisation de l'objectif.
Il prévoit enfin, en cas de carence d'une commune, un dispositif permettant à l'Etat de se substituer à elle.
Pour critiquer ces dispositions, les requérants font valoir qu'elles méconnaissent, à plusieurs titres, le principe de libre administration des collectivités territoriales.
Les sénateurs, auteurs du premier recours, considèrent en outre que le texte porte atteinte au principe d'égalité en traitant différemment les communes d'Ile-de-France. Ils estiment que la loi méconnaît les limites constitutionnelles à la rétroactivité en prenant en compte une situation antérieure à sa promulgation. Ils critiquent également le seuil de 20 % de logements sociaux comme ne répondant à aucune exigence proportionnalité. Ils contestent aussi l'exclusion de certains types de logements sociaux du champ de la loi. Ils estiment que la modification des plans d'urbanisme qui résultera de l'obligation posée par la loi provoquera des atteintes au droit de propriété. Ils considèrent enfin que l'article 55 conduit, en méconnaissance de l'égalité devant l'impôt, à sanctionner les contribuables des communes qui ne pourront pas faire face à leur obligation.
De leur côté, les députés auteurs du second recours ajoutent une critique de la distinction, faite par l'article 55, entre bailleurs publics et privés. Ils contestent la notion, selon eux imprécise, de « mixité sociale ». Ils estiment que le nouvel article L. 302-9 du code de la construction et de l'habitation dote le préfet de pouvoir excessifs en l'habilitant à prononcer, à l'égard des communes défaillantes, des sanctions automatiques. Enfin, ils considèrent que la loi est entachée d'incompétence négative.
B. - Pour sa part, le Gouvernement considère que ces dispositions ne sont pas contraires à la Constitution.
Comme le souligne l'ancien président de la Commission consultative des droits de l'homme, P. Bouchet, dans son ouvrage La Misère hors la loi : « La reconnaissance du droit au logement implique que l'Etat ait comme obligation corrélative d'assurer ou de garantir la construction d'un nombre suffisant de logements pour qu'enfin aucun de ses ressortissants ne reste sans abri. Cela oblige, pour y parvenir, à s'attaquer aux causes concrètes du manque de logements, notamment au coût excessif du foncier, comme aux causes culturelles, telles que le refus des communes riches de construire des logements sociaux sur leur territoire (...) C'est à l'Etat, non aux communes qu'il revient d'être le garant des droits fondamentaux (...) L'Etat est le garant du droit, il n'en est pas obligatoirement le gérant, pour autant que les communes acceptent d'en être elles-mêmes les gérantes. »
C'est dans cet esprit, et avec le souci d'un juste équilibre entre cet impératif national et les prérogatives des communes, qu'a été élaboré le dispositif que définit l'article 55 et que critiquent les parlementaires requérants.
1. En réponse à ces critiques, le Gouvernement entend d'abord souligner que l'objectif de mixité sociale assigné par la loi à chaque commune urbaine, et consistant à compter à terme 20 % de résidences principales constituées de logements locatifs sociaux, n'a rien d'arbitraire.
a) Il ne l'est pas, en premier lieu, quant au choix du taux de 20 %.
Il convient à cet égard de noter que, à l'heure actuelle, la proportion moyenne de logements locatifs sociaux HLM proprement dits est de 23 % dans l'ensemble des agglomérations visées par cette disposition. Cette part est même supérieure, si l'on prend en compte la définition des logements sociaux retenue par l'article 55.
L'objectif de la mesure étant de parvenir à une meilleure répartition géographique des logements sociaux entre les différentes communes constituant une même agglomération, sur une longue durée, le chiffre de 20 % constitue donc un objectif raisonnable et une référence en rapport avec l'objet de la mesure.
b) En deuxième lieu, la définition des logements pris en compte au titre de cet objectif par le nouvel article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation est cohérente.
L'article L. 302-5 vise l'ensemble des logements locatifs soumis à un loyer encadré par la réglementation et réservé à des locataires à ressources modestes - c'est-à-dire dont les ressources ne dépassent pas des plafonds fixés par l'autorité administrative, ces deux critères étant la contrepartie de l'aide apportée par l'Etat au bailleur lors de leur construction.
Autrement dit, il s'agit des logements dont la location est soumise à des conditions particulières parce que leur construction a bénéficié d'une aide particulière attribuée au titre du régime du logement locatif social.
La plus grande partie des logements entrant dans ces critères appartiennent effectivement à des organismes d'habitation à loyer modéré, de statut public ou privé, et à des sociétés d'économie mixte de construction. Les logements locatifs appartenant à des personnes physiques ou à des personnes morales de droit privé sont également compris dans cette définition, dès lors qu'ils sont conventionnés en application de l'article L. 351-2 du code de la construction.
Au sein de cette catégorie considérée, l'ensemble des logements ont donc été traités de la même manière, quel que soit leur propriétaire. Et dès lors que la loi ne vise que les logements locatifs, c'est en vain que le recours des sénateurs critique l'exclusion des résidences privées acquises par une aide à l'accession à la propriété.
c) S'agissant, en troisième lieu, des communes concernées, l'article 55 ne méconnaît pas davantage le principe d'égalité.
Le nouvel article L. 302-5 s'applique aux communes dont la population est au moins égale à 1 500 habitants en Ile-de-France et 3 500 habitants dans les autres régions, dès lors, d'une part, que ces communes sont comprises dans une agglomération de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants et, d'autre part, que le nombre total de logements locatifs sociaux y représente, au 1er janvier de l'année précédente, moins de 20 % des résidences principales. La loi précise que la notion d'agglomération ainsi retenue est celle du recensement général, que les communes en cause soient incluses ou non dans une structure de coopération intercommunale.
Compte tenu de l'objet de la mesure, qui est de favoriser un meilleur équilibre de l'offre de logement locatif social, des différences de situation objectives existent entre les communes parties prenantes d'une agglomération et celles qui sont isolées.
Par ailleurs, le seuil minimal de 1 500 habitants en Ile-de-France et 3 500 habitants dans les autres régions permet de retenir les communes qui peuvent être regardées comme urbaines, c'est-à-dire, celles d'une taille suffisante pour que l'on puisse utilement rechercher un équilibre entre les différents modes d'habitat. Dans des communes plus petites, il serait largement vain de fixer une proportion relative de logements d'un type déterminé. Quantitativement, cela porterait sur un nombre de logements très réduit, dont la réalisation ne constituerait qu'un apport marginal à ce rééquilibrage.
Quant à la différence de seuil entre les communes d'Ile-de-France et celles des autres régions, elle est destinée à tenir compte de ce que, en Ile-de-France plus qu'ailleurs, compte tenu du caractère massif de l'urbanisation, des communes de cette taille participent effectivement à la notion d'agglomération. Il faut noter que de très nombreuses législations fixent des dispositions particulières pour la région Ile-de-France, compte tenu de sa concentration urbaine, de sa taille et de ses caractéristiques qui ne la rapprochent d'aucune autre région.
La prise en compte de cette situation spécifique, déjà admise par la jurisprudence (décision no 91-291 DC du 6 mai 1991), est particulièrement légitime lorsqu'il s'agit d'appréhender les phénomènes de mixité sociale. La loi reprend d'ailleurs sur ce point la distinction qui a été introduite dans le code de la construction et de l'habitation par la loi du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions.
D'autre part, le législateur était fondé à tenir compte de la situation de certaines catégories de communes pour les placer en dehors du champ de la mesure. C'est ce que fait l'article L. 302-5 pour les communes dont plus de la moitié du territoire urbanisé est soumis à une inconstructibilité résultant d'un plan d'exposition au bruit approuvé en application de l'article L. 147-1 du code de l'urbanisme ou d'une servitude de protection instituée au titre de la législation sur les installations classées.
Il est en effet cohérent de traiter différemment des communes qui voient, pour des raisons tirées de la protection contre des nuisances ou des risques particuliers, leurs capacités à réaliser de nouveaux logements ou même à maintenir ceux qui existent en cas de changement d'usage, fortement limitées : la perspective à terme est bien de voir reculer le nombre de personnes résidant sur leur territoire, quel qu'en soit le mode d'habitat. Il serait donc juridiquement incohérent de les inciter à réaliser des logements locatifs sociaux nouveaux alors que d'autres logements ne seraient plus autorisés, en raison de législations spécifiques.
2. C'est également à tort que les requérants font état d'une incompétence négative du législateur et du caractère inapplicable des dispositions dans certaines communes.
En effet, si, comme il vient d'être dit, la loi a prévu des exemptions au bénéfice de communes dont une partie importante du territoire urbanisé ne peut plus, pour des raisons de protection contre des risques ou des nuisances, accueillir de nouveaux logements, ces motifs bien spécifiques ne peuvent être étendus à d'autres situations - dont celles visées par les auteurs de la saisine - qui ne sont pas comparables : par définition, les logements sociaux ont vocation à être réalisés dans les mêmes conditions et dans les mêmes secteurs que ceux qui abritent d'autres types de logements. La question de l'existence ou de l'inexistence de grands espaces non susceptibles d'être ouverts à l'urbanisation doit donc être regardée comme sans incidence sur l'application de la loi.
A cet égard, il importe de souligner que la notion de « réalisation » de logements locatifs sociaux n'implique pas nécessairement la construction de bâtiments neufs : ceux-ci peuvent parfaitement être réalisés en acquisition dans un parc existant, dans des immeubles collectifs ou individuels. Un nombre de logements représentant 3 % du parc de logement change chaque année de propriétaire et, à défaut de vente spontanée aux organismes HLM, les communes disposent d'un droit de préemption urbain qui peut leur permettre, dans des conditions juridiquement certaines, d'acquérir, le cas échéant, les logements nécessaires à la réalisation des objectifs fixés par la loi.
3. Le moyen tiré d'une incidence de la mesure sur les plans d'urbanisme et sur le droit de propriété n'est pas davantage fondé.
Contrairement, en effet, à ce que soutiennent les sénateurs, auteurs de la première saisine, la réalisation de logements locatifs sociaux n'entraîne aucunement la nécessité de modifier les documents d'urbanisme applicables dans les communes, qui n'ont d'ailleurs pas vocation à fixer une réglementation spécifique en la matière : il s'agit des logements comme les autres, pouvant être réalisés dans tous les secteurs qui ont une vocation d'habitat. Le moyen manque donc en fait sur ce point.
Quant à la perspective, énoncée par les auteurs de la saisine, de voir la valeur de certains biens immobiliers affectés par la réalisation de logements locatifs sociaux, elle ne saurait, en tout état de cause, être regardée comme affectant le droit de propriété.
4. S'agissant du prélèvement sur ressources fiscales, il ne se heurte, contrairement à ce qui est soutenu, à aucun obstacle constitutionnel.
a) En premier lieu, le prélèvement sur les recettes fiscales des communes qui comptent moins de 20 % de résidences principales constituées de logements locatifs sociaux n'a ni pour objet, ni pour effet d'interdire aux collectivités concernées d'exercer effectivement leurs attributions.
L'objet du prélèvement sur les recettes fiscales des communes est de faire en sorte, comme c'est le cas dans d'autres domaines, que les communes utilisent effectivement au moins une partie de leurs ressources pour mettre en oeuvre concrètement une des compétences que la loi leur a assignées - favoriser la réalisation de logements locatifs sociaux.
A défaut d'affecter d'elles-mêmes une certaine somme - que la loi leur permet de connaître avec précision au début de chaque année - à la réalisation de logements locatifs sociaux, le montant qui aurait dû être directement consacré à la réalisation de l'objectif fixé par le législateur sera affecté à la structure intercommunale dont elles sont membres ou, à défaut, de l'établissement public foncier dont elles relèvent ou, à défaut encore, à un fonds national.
Chacun de ces attributaires devra affecter ces sommes à la réalisation de logements locatifs sociaux dans les communes qui en comptent un nombre insuffisant pour mettre en oeuvre l'objectif de mixité sociale.
Le fondement du prélèvement est donc bien la situation objective constatée, chaque année et pour la première fois au 1er janvier 2002, quant au nombre de logements locatifs sociaux par rapport au nombre de résidences principales. Ce dispositif ne présente donc aucun caractère de sanction. Il tient compte de la situation exacte de chaque commune. Toutes les sommes dépensées par la commune pour les objets visés par la loi venant en déduction du prélèvement, celui-ci peut donc être nul.
Ainsi, la loi institue essentiellement un mécanisme de dépense obligatoire analogue à celui qui a été déclaré conforme à la Constitution par la décision, déjà citée, du 6 mai 1991.
C'est donc à tort que les auteurs des saisines assimilent le prélèvement en cause aux suppressions de recettes qui ont pu être décidées au titre de mesures d'allégement ou de simplification fiscale. Il ne s'agit pas ici d'une suppression ou même d'une réduction de ressources pour les collectivités concernées. Le moyen tiré de ce qu'aucun dispositif de compensation n'est institué par la loi est donc inopérant.
b) En deuxième lieu, c'est à tort que les requérants font grief au dispositif de ne pas comprendre de limitation de durée. En effet, le mode de calcul même du prélèvement implique nécessairement que, lorsque l'écart entre le nombre de logements locatifs sociaux présents sur le territoire communal et celui qui correspondrait à l'objectif de 20 % est ramené à zéro, le prélèvement est nul.
En outre, le législateur a prévu qu'en deçà de 25 000 F - soit 25 logements -, le prélèvement ne sera pas effectué, ce qui doit permettre de tenir compte des situations dans lesquelles la part des logements locatifs sociaux, sans atteindre réellement 20 % des résidences principales, en est très proche. Les conditions d'application de la mesure sont donc définies avec précision par la loi.
c) En troisième lieu, les principes du consentement à l'impôt et d'égalité devant l'impôt ne sont pas méconnus.
Le consentement des contribuables communaux à l'impôt, à travers les conseils municipaux, n'est, en tout état de cause, pas affecté par une loi qui, comme il a été souligné plus haut, institue essentiellement un mécanisme de dépense obligatoire.
En outre, le calcul du prélèvement sur recettes tient compte du potentiel fiscal des communes, en modulant ce prélèvement, suivant que le potentiel fiscal de la commune excède ou non 5 000 F par habitant.
5. Enfin les pouvoirs conférés au préfet par l'article L. 302-9 en cas de carence de la commune n'ont rien d'excessif.
Il convient d'abord de souligner qu'il ne s'agit pas d'un mécanisme de sanction automatique. En effet, la loi ne saurait être interprétée comme impliquant que le préfet se trouve en situation de compétence liée pour prendre l'arrêté de carence. Elle peut d'autant moins être ainsi comprise que le législateur a prévu la consultation du conseil départemental de l'habitat, cette intervention étant ainsi destinée à éclairer le préfet, ce qui exclut nécessairement tout automatisme de la mesure.
Il résulte ainsi de l'article L. 302-9 qu'avant de décider s'il constate la carence, le préfet devra prendre en compte les éléments que la commune pourra faire valoir, tels que la faiblesse de l'écart constaté entre les objectifs fixés pour la période triennale et les logements effectivement réalisés, ou des circonstances particulières ayant pu expliquer cet écart.
En outre, ce même article organise une procédure accordant des garanties aux collectivités susceptibles d'être concernées par ce mécanisme. Elles doivent ainsi établir, au terme de chaque période triennale, un bilan portant, en particulier, sur le respect des engagements en matière de mixité sociale. Ce bilan est communiqué au conseil départemental de l'habitat. Lorsque les engagements figurant dans le programme local de l'habitat n'ont pas été tenus, ou, à défaut, lorsque le nombre de logements locatifs sociaux à réaliser n'a pas été atteint, le préfet peut constater la carence de la commune. Il ne le fait qu'après avis du conseil départemental de l'habitat, et par arrêté motivé.
Cette procédure permet à la commune, qui établit elle-même le bilan des actions menées sur son territoire pour mettre en oeuvre l'objectif de mixité sociale dans l'habitat par la réalisation de logements locatifs sociaux, de présenter sa position et de faire prévaloir, le cas échéant, les raisons qui peuvent expliquer que les objectifs fixés par le programme local de l'habitat ou par sa propre délibération n'ont pu être atteints. A cet égard, il convient de rappeler que, eu égard à la nature de cette mesure, le principe du contradictoire trouvera à s'appliquer, sans que l'on puisse utilement reprocher à la loi de ne pas l'avoir rappelé (no 97-389 DC du 22 avril 1997).
Enfin il va de soi que l'arrêté préfectoral constatant la carence pourra être contesté devant le juge administratif, sans que, là aussi, la loi ait eu à le rappeler explicitement.
VII. - Sur l'article 145
A. - L'article 145 de la loi déférée insère, dans le code de la construction et de l'habitation, un nouvel article L. 411-5 ayant pour objet de maintenir dans le parc social certains logements appartenant aux sociétés immobilières à participation majoritaire de la Caisse des dépôts et consignations.
Il s'agit de ceux faisant l'objet, au 30 juin 2000, d'une convention définie à l'article L. 351-2 et assimilables au logement social. La liste de ces logements est fixée par arrêté en tenant compte, en particulier, de l'occupation sociale des immeubles, appréciée en fonction de la proportion des bénéficiaires de l'aide personnalisée au logement qu'ils accueillent.
Les auteurs des saisines estiment que l'article 145 porte une atteinte excessive au droit de propriété et à la liberté des sociétés visées par ce régime. Ils considèrent également que ces dispositions méconnaissent le principe d'égalité, en imposant aux logements en cause des contraintes auxquelles ne sont pas soumis des logements comparables appartenant à d'autres bailleurs. Ils font enfin valoir que le Parlement n'a pas pleinement exercé sa compétence, notamment en renvoyant à un arrêté ministériel.
Les députés, auteurs du second recours, font en outre grief à l'article 145 d'être entaché de rétroactivité.
B. - Ces critiques appellent les observations suivantes :
1. S'agissant du principe d'égalité, invoqué par les requérants, il convient de rappeler qu'il ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la loi.
Or les filiales majoritaires de la Caisse des dépôts et consignations qui ont fait l'objet d'un conventionnement présentent des caractéristiques qui en font une catégorie de bailleurs sociaux à part entière.
a) A cet égard, on soulignera d'abord que le patrimoine des filiales de la SCIC concernées par cet article a été financé par des fonds publics :
- la Caisse des dépôts et consignations, qui a été l'apporteur principal des fonds propres ayant permis la construction de ces logements, est un établissement public qui concourt à des missions d'intérêt général ;
- en complément des fonds propres, la construction a été financée grâce à des prêts (aujourd'hui remboursés) consentis par le Crédit foncier et la Caisse des dépôts et consignations ;
- la réhabilitation de ce patrimoine dans les années 1980 a été réalisée grâce à la prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale (« PALULOS »), accordée par l'Etat.
b) Il faut ensuite rappeler que la création, le 16 avril 1954, de la SCIC, qui est concernée par cette mesure, a répondu à un objectif spécifique, celui de répondre aux besoins de logement des classes modestes du pays, de gérer le patrimoine immobilier qui en sera issu et tous les services qu'il faudra mettre en place au fur et à mesure des réalisations.
c) Parmi les bailleurs sociaux institutionnels énumérés à l'article 41 ter de la loi no 86-1290 du 23 décembre 1986, les sociétés civiles immobilières à participation majoritaire de la Caisse des dépôts et consignations sont les seules, avec les sociétés d'économie mixte que l'article 145 vise tout autant, à bénéficier de dispositions fiscales particulières (l'exonération de la contribution additionnelle à la contribution annuelle représentative du droit de bail en application de l'article 234 nonies III du code général des impôts). De même faut-il préciser que les logements en cause sont pris en compte comme logements sociaux dans le calcul de la dotation de solidarité urbaine dont bénéficient certaines communes.
d) Enfin, l'article 145 ne porte aucune atteinte excessive aux droits des actionnaires minoritaires des sociétés concernées. Il faut à cet égard souligner que ces actionnaires minoritaires ne sont pas des particuliers, mais des entreprises qui cotisent au 1 % patronal, des société d'HLM, des collectivités locales, dont la mission est de participer à la mise en oeuvre du droit au logement, ou sur qui pèsent des obligations au titre de ce droit.
Ainsi, le maintien de ce parc locatif dans le parc social permet aux entreprises qui cotisent dans le cadre du 1 % patronal de conserver un droit à l'attribution des logements.
2. En deuxième lieu, le maintien dans le parc social du patrimoine en cause ne s'analyse évidemment pas comme une privation du droit de propriété. Il s'agit d'une simple limitation de ce droit, qui n'est pas contraire à la Constitution dès lors que la mesure n'a pas pour effet d'en dénaturer le sens et la portée (no 98-403 DC du 29 juillet 1998).
Il convient à cet égard de rappeler que le patrimoine concerné peut toujours être vendu, dans son entier ou par lots, et ceux-ci donnés en location moyennant le paiement d'un loyer.
En l'espèce, il est d'autant plus légitime de limiter le droit de propriété de certains actionnaires que ce dispositif concourt à la réalisation de l'objectif constitutionnel dégagé par la décision no 94-359 DC du 19 janvier 1995.
3. En troisième lieu, c'est à tort qu'il est reproché au législateur de prévoir l'intervention d'un arrêté.
En effet, la compétence accordée au pouvoir réglementaire pour dresser la liste des sociétés concernées par la pérennisation du caractère social de leur patrimoine est suffisamment encadrée par la loi : les logements concernés par la pérennisation sont en effet ceux qui, à l'intérieur du parc du bailleur institutionnel que sont les filiales majoritaires de la SCIC, présentent le caractère social le plus manifeste, le bénéfice de l'aide personnalisée au logement apparaissant, à cet égard, comme le critère le plus significatif.
Il appartiendra donc à l'arrêté d'apprécier, en fonction de la proportion de locataires qui bénéficient de cette aide, quels sont ceux des logements qui seront « pérennisés » dans le parc social.
4. En quatrième lieu, la liberté contractuelle dont se prévalent les requérants n'a pas, en elle-même, valeur constitutionnelle. L'article 145 ne peut en tout cas être utilement contesté sur ce terrain, dès lors qu'il ne porte pas, à la liberté des parties à une convention, une atteinte telle que le principe de liberté, énoncé par l'article 4 de la Déclaration de 1789, s'en trouverait dénaturé.
Les conventions conclues entre les filiales de la SCIC et l'Etat, sur le fondement du 3o de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation, et par lesquelles, en contrepartie de primes « PALULOS », les loyers sont plafonnés et les logements loués sous conditions de ressources, étaient d'une durée d'au moins neuf ans. Au terme de ces conventions, le bailleur pouvait soumettre la location au régime locatif « libre » de la loi du 6 juillet 1989, c'est-à-dire ne limitant ni les loyers ni les ressources des locataires.
Compte tenu de l'intérêt éminent qui s'attache à la mise en oeuvre du droit au logement, l'article critiqué a pu, sans méconnaître les principes constitutionnels, imposer le maintien, au-delà du terme de la convention, d'un régime spécifique qui concourt à la réalisation de l'objectif constitutionnel déjà mentionné.
5. S'agissant enfin de l'application de la loi au 30 juin 2000, il convient de rappeler que le principe de la non-rétroactivité des lois n'a valeur constitutionnelle, en vertu de l'article 8 de la Déclaration de 1789, qu'en matière répressive.
Il était donc loisible au législateur de choisir la date d'effet qu'il a retenue, compte tenu de l'intérêt général qui s'attachait au maintien des logements en cause dans le parc social.
En tout état de cause, la loi ne peut être considérée, en l'espèce, comme véritablement rétroactive qu'en tant qu'elle s'applique aux baux qui ont pu être signés depuis le 30 juin 2000. En revanche, elle ne dispose que pour l'avenir en tant qu'elle soumet à nouveau au régime en cause des logements qui ont pu en être sortis depuis cette date, mais qui n'ont pas été loués. Naturellement, l'arrêté mentionné plus haut ne s'appliquera pas à ceux des logements visés par la mesure qui auraient été vendus dans l'intervalle.
VIII. - Sur l'article 187
A. - Cet article introduit dans le code civil et dans la loi du 6 juillet 1989 la notion de logement décent.
Il s'agit d'inciter les propriétaires de biens immobiliers mis en location à faire les travaux d'amélioration et d'entretien nécessaires pour garantir un logement qui respecte des normes minimales destinées à préserver la santé, la sécurité physique, et la dignité du locataire.
Pour contester cet article , les députés requérants font valoir que le législateur a méconnu l'étendue de sa compétence en ne précisant pas la notion de « décence » sur laquelle il repose. Ils considèrent que l'article 187 méconnaît le principe d'égalité, et porte une atteinte excessive au droit de propriété et à la liberté contractuelle des bailleurs.
B. - Pour sa part, le Gouvernement considère que ces dispositions ne sont pas contraires à la Constitution.
1. S'agissant, en premier lieu, du moyen tiré de l'incompétence négative, on rappellera d'abord que le fait qu'une disposition puisse paraître imprécise n'est pas nécessairement de nature à affecter sa conformité à la Constitution et qu'en droit français, il n'est pas d'usage que les textes normatifs définissent chacun des termes qu'ils emploient : en cas de litige, il appartient aux juridictions chargées d'appliquer la loi de l'interpréter comme l'implique, de manière générale, le principe énoncé par l'article 4 du code civil.
Au demeurant, on peut relever que, indépendamment des textes relatifs au logement qui y ont déjà eu recours, la notion de décence a été, de longue date, employée dans de nombreux textes, sans que son application ait soulevé de difficultés : pour ne prendre qu'un exemple, on peut citer l'actuel article L. 2213-9 du CGCT qui reprend l'ancien article L. 131-2 du code des communes sur le pouvoir de police du maire, lui-même issu de la loi municipale de 1884.
En tout état de cause, le moyen manque en fait, dès lors que l'article contesté fournit, à travers les dispositions insérées dans l'article 6 de la loi de 1989, une définition précise : pour correspondre à l'exigence de décence, le logement ne doit pas laisser apparaître de risques manifestes pour la sécurité physique ou la santé des locataires et être doté d'éléments de confort minimum.
2. En deuxième lieu, la mise en oeuvre de ces exigences minimales ne porte pas atteinte au droit de propriété. Le propriétaire conserve la libre disposition de son bien. Il peut contracter, vendre ou louer.
3. En troisième lieu, la liberté des conventions ne s'oppose pas à ce que le législateur intervienne pour fixer un cadre normatif dans le but de protéger l'un ou l'autre des cocontractants. C'est d'autant plus légitime que la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent constitue, comme il a déjà été rappelé, un objectif de valeur constitutionnelle.
IX. - Sur l'article 193
A. - Le 3o de l'article 193 de la loi introduit, dans la loi du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière, au chapitre VII intitulé « Des procédures de concertation », trois nouveaux articles qui complètent le dispositif de concertation existant depuis 1986 en matière de rapports locatifs.
L'objectif du législateur est de rendre effective la concertation entre les bailleurs et les locataires, en instaurant pour les bailleurs des secteurs locatifs mentionnés à l'article 41 ter, tel qu'il est modifié par l'article 197 de la présente loi, l'obligation d'élaborer pour leur patrimoine locatif un plan de concertation locative. Ce plan de concertation locative doit être élaboré avec les représentants des associations présentes dans le parc locatif considéré et affiliées à la commission nationale de concertation, avec les représentants des associations ayant obtenu 10 % des suffrages exprimés aux dernières élections, et avec les administrateurs élus.
L'objet du plan est de préciser les conditions de la concertation qui peut se dérouler, selon le choix des partenaires, par immeuble ou groupe d'immeubles au sein d'un ou plusieurs conseils de concertation locatives.
Chaque conseil de concertation locative composé de représentants du bailleur et des locataires est consulté sur les questions relatives à la gestion de l'immeuble ou des immeubles pour lequel il est constitué, sur les projets d'amélioration ou de construction démolition et plus généralement sur toutes les mesures projetées par le bailleur qui sont susceptibles d'avoir des incidences sur les conditions d'habitat et le cadre de vie des habitants des ensembles immobiliers concernés.
Les députés, auteurs du second recours, estiment que ce dispositif porte une atteinte excessive au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre en imposant de telles obligations à l'ensemble des bailleurs. Ils font également valoir que l'article 193 méconnaît le principe d'égalité en ne distinguant pas entre les bailleurs suivant qu'ils poursuivent ou non un but social, et s'avère en outre contradictoire avec le champ d'application de l'article 55.
B. - Cette argumentation ne peut être accueillie.
1. En premier lieu, l'article 44 bis nouveau de la loi du 23 décembre 1986 n'a méconnu ni le droit de propriété, ni la liberté d'entreprendre.
Le droit de propriété n'est absolument pas dénaturé par les dispositions qui instaurent, pour les bailleurs institutionnels, l'obligation d'élaborer un plan de concertation pour leur patrimoine. Aucun des attributs du droit de propriété n'est remis en cause par ce dispositif. En effet le plan de concertation locative a pour seul objectif de définir les modalités de concertation du bailleur avec les représentants des locataires exclusivement dans le cadre du ou des conseils de concertation locatives, qui sont consultés par les bailleurs sur ses projets en relation avec la gestion de l'immeuble ou des immeubles concernés.
Les conseils de concertation locative sont des organes purement consultatifs. Ils n'ont aucune compétence en ce qui concerne notamment l'affectation locative des biens immobiliers de chaque bailleur. Le législateur n'a, en aucune façon, entendu transférer aux conseils de concertation locative les compétences du propriétaire en matière d'affectation de son patrimoine.
Ces mesures n'ont ni pour objet, ni pour effet, de limiter la libre disposition du bien par son propriétaire. Elles ne remettent pas davantage en cause la liberté d'entreprendre.
Par ailleurs, et contrairement à ce qui est soutenu, l'article 193 n'oblige en rien les bailleurs institutionnels à révéler des éléments confidentiels sur leur gestion d'ensemble. Les obligations d'information qu'il édicte ne portent que sur la gestion locative, ensemble immobilier par ensemble immobilier.
On rappellera enfin que des mécanismes de concertation existent depuis 1982, qui ont permis d'améliorer les rapports locatifs. Le développement de la concertation locative est d'autant plus légitime que les participants à la concertation sont les représentants des occupants des immeubles.
2. En deuxième lieu, les dispositions contestées ne portent, contrairement à ce que soutiennent les requérants, aucune atteinte au principe d'égalité devant la loi.
A cet égard, c'est en vain que les requérants critiquent la soumission à ce régime des bailleurs dits institutionnels et des bailleurs sociaux en faisant valoir qu'ils poursuivent des objectifs différents dans leur fonction locative. En effet, les rapports locatifs dans le parc locatif social et dans le parc locatif privé sont, d'ores et déjà, régis par les mêmes textes, à savoir la loi du 23 décembre 1986 et la loi du 6 juillet 1989.
Le législateur a précisé de façon explicite, à l'article 40 de la loi de 1989, les dispositions qui ne sont pas applicables aux bailleurs sociaux parce qu'elles relèvent d'une législation spécifique, en raison notamment des aides financières dont les bailleurs ont bénéficié pour construire ou acquérir les logements. Ces aides financières justifient en particulier que des règles spéciales s'appliquent en matière de loyer et pour ce qui concerne le congé donné par le bailleur et le droit au maintien dans les lieux.
Hormis ces dispositions, les mesures législatives s'appliquent dans les mêmes conditions aux bailleurs privés et aux bailleurs sociaux, en particulier celles du chapitre VII de la loi du 23 décembre 1986 relatives à la procédure de concertation.
Il est donc légitime d'adopter un traitement identique en matière de concertation pour des bailleurs qui, pour l'essentiel, sont soumis au même régime juridique.
Au surplus, il est à noter que, pour mettre en place le nouveau dispositif, le législateur a pris en compte l'importance du patrimoine locatif du bailleur, en considérant qu'une telle démarche ne pouvait être imposée qu'aux bailleurs qui disposent d'un patrimoine immobilier locatif conséquent. En effet, imposer la mise en place de plan de concertation locative dans le patrimoine des bailleurs personnes physiques aurait été inopérant lorsque l'on sait que ces bailleurs sont propriétaires en moyenne de 1 ou 2 logements et, dans des cas très exceptionnels, de 3, ceux-ci n'étant d'ailleurs pas nécessairement localisés dans les mêmes immeubles.
Le dispositif contesté s'est donc conformé au principe d'égalité en soumettant aux mêmes obligations les bailleurs sociaux et institutionnels et en excluant les bailleurs personnes physiques.
3. En troisième lieu, c'est à tort que les requérants dénoncent l'incohérence qu'il y aurait, selon eux, à imposer l'obligation de concertation aux bailleurs institutionnels alors qu'ils ne sont pas concernés par l'article 55.
D'une part, en effet, les bailleurs institutionnels soumis aux obligations de l'article 193 ne sont pas exclus du champ de l'article 55 : les logements des bailleurs institutionnels conventionnés à l'aide personnalisée au logement entreront à la fois dans le champ d'application de l'article 55 de la loi et dans celui du 3o de l'article 193.
D'autre part, il convient de souligner que les objectifs visés par les articles 55 et 193 sont totalement différents, dans la mesure où le premier définit les logements sociaux à prendre en compte dans le recensement des logements existant dans les communes soumises à l'objectif de mixité sociale défini par la loi.
Enfin il convient de rappeler que, contrairement à ce qu'affirment les députés, auteurs de la seconde saisine, le titre de la sous-section 2 « la concertation dans le parc social » ne signifie pas que le législateur n'a pas entendu appliquer cette disposition aux bailleurs institutionnels. En effet cet énoncé résultait d'un amendement déposé en première lecture devant l'Assemblée nationale. Or, au cours des débats, les parlementaires ont clairement affirmé leur volonté d'élargir la liste des catégories des bailleurs soumis à la concertation.
4. En dernier lieu, c'est à tort que les requérants font état du caractère prétendument inopérant de l'article 44 ter relatif au conseil de concertation.
L'article précise, en effet, la compétence du conseil et sa composition. La compétence est définie, à dessein, de façon large mais la référence aux mesures touchant aux conditions d'habitat et du cadre de vie des habitants signifie seulement que le conseil de concertation a, sur le strict plan consultatif, les compétences les plus larges.
X. - Sur les articles 205 et 206
A. - Issus d'un amendement introduit en première lecture au Sénat, les articles 205 et 206 de la loi déférée concernent la composition du comité syndical des syndicats mixtes de parcs naturels régionaux.
L'article 205 introduit, dans le code rural, par dérogation aux dispositions du code général des collectivités territoriales relatives au fonctionnement des syndicats mixtes ouverts, des règles particulières en matière de composition de l'organe délibérant et d'élection du président pour les syndicats mixtes de gestion des parcs naturels régionaux. L'article 206 est un article de coordination qui modifie le code général des collectivités territoriales.
Pour critiquer ces dispositions, les députés, auteurs du second recours, font valoir qu'elles introduisent une dérogation injustifiée au régime des syndicats mixtes, en violation du principe d'égalité. Ils estiment que le législateur a ainsi empiété sur le domaine réglementaire, tout en méconnaissant la libre administration de ces syndicats mixtes. Enfin l'amendement qui est à l'origine de ces articles aurait été adopté en violation de la jurisprudence encadrant l'exercice du droit d'amendement.
B. - Ces critiques appellent les remarques suivantes.
1. S'agissant de la procédure parlementaire, il convient de rappeler que le dispositif de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains traduit la volonté du Gouvernement de tendre à une cohérence d'ensemble de la politique d'urbanisme en introduisant des éléments de coordination entre les différents documents concernés. Les parcs naturels régionaux, dont la gestion est confiée par l'article L. 244-2 du code rural à des syndicats mixtes ouverts, s'intègrent dans cette démarche. En effet, les chartes des parcs naturels régionaux sont opposables aux documents d'urbanisme. Ceux-ci doivent être compatibles avec les orientations et les mesures des chartes.
L'amendement contesté n'est donc pas dépourvu de tout lien avec le projet de loi soumis au Parlement.
2. Sur le fond, on ne voit pas en quoi le principe d'égalité se trouverait méconnu par la disposition contestée. Quant au moyen tiré du caractère réglementaire de la mesure, il est inopérant.